« La naissance d’un père » – Film

Sous l’égide de la Haute Ecole de Santé Vaud (HESAV) en collaboration avec männer.ch, le projet est constitué de la création de 5 films vidéo sur le thème de la place et du rôle des futurs pères au moment de l’arrivée d’un enfant dans le couple. Quelles expériences habitent un homme qui devient père? L’épreuve de l’accouchement, sa participation du point de vue des professionnel-l-e-s des soins, l’allaitement et la parentalité sont autant de thèmes qui y sont abordés. Des témoignages de futurs pères sont enrichis par le point de vue de professionnel-l-e-s de la périntalité et complétés par des apports scientifiques.

Pour les visionner avec sous-titrage anglais, allemand et italien :

www.naissancedunpere.ch

Le projet se développe dès 2020 en Suisse allemande où des rencontres en présence seront organisées grâce au soutien de Promotion Santé Suisse.

Evénements La naissance d’un père organisés :

  • Soirée grand public au Cinéma Bellevaux – jeudi 10 janvier 2019 de 19h00 à 21h30, Route Aloys-Fauquez 4, Lausanne
  • Soirée grand public à Arcade sages-femmes – lundi 14 janvier 2019 de 20h30 à 22h30, Boulevard Carl-Vogt 85, Genève
  • Midi-conférence grand public à la HETS-FR, mardi 12 mars 2019, de 12h30 à 13h30, Haute Ecole en travail social (HETS-FR), Route des Arsenaux 16a, Fribourg
  • Workshop d’évaluation final du projet « La naissance d’un père – Mardi 5 février 2019 de 17h00 – 20h00 – Haute Ecole Santé Vaud (HESAV) – Av. César-Roux 19 Amphithéâtre 30.06, Lausanne
  • Café-recherche HESAV, jeudi 14 février 2019 de 12h00 à 13h00 – Haute Ecole Santé Vaud (HESAV) – Av. César-Roux 19, salle CR/30-05, Lausanne

Ce que nous avons appris du projet « La naissance d’un père »

Entrer en paternité : du désir d’enfant à l’accouchement

Le projet d’enfant n’est pas automatiquement lié à une relation de couple. D’ailleurs une partie importante des naissances ne sont pas planifiées précisément. 9  Suissesses  et  Suisses  sur  10  désirent  devenir  parents  d’au  moins  deux  enfants.  Aucune  disparité n’existe entre les sexes. Les différences observées dépendent de l’âge (plus largement chez les moins de 30 ans), du  type  de  relation  (chez  les  personnes  mariées  plus  que  chez  les  personnes  non-mariées)  et  du  taux  d’occupation  professionnelle  (plus  chez  les  personnes  avec  un  taux  inférieur, ceci toutefois seulement chez les femmes). Plus d’hommes que de femmes voient les enfants comme une  condition  préalable  à  une  vie  comblée.  Dans  le  même  temps,  il  s’agit  de  différencier  chez  les  hommes  le  désir  d’avoir un enfant du désir de fonder une famille. Alors que le premier exprime, au sens littéral du terme, le vœu d’avoir un enfant et de vivre une relation avec lui, le second répond plutôt au désir d’accéder au «mode de vie familial» et au statut de père de famille. » (MenCare Suisse – Report Vol. 1, 2016).

La contraception : une responsabilité de chaque partenaire du couple

L’homme joue un rôle important dans la contraception du couple. Il consiste à contrôler sa part de risque d’avoir une grossesse non voulue qui se monte à 50%. S’il ne désire pas avoir d’enfant suite à un rapport sexuel, il doit prendre ses responsabilités : utiliser les moyens actuels de contraception masculine les plus adéquats qui sont le port du préservatif et la vasectomie. Il doit faire en sorte que la meilleure contraception soit assurée par ses propres soins et ne pas dépendre de sa partenaire : en étant toujours attentif à avoir des préservatifs sur soi, à en assurer leur qualité (taille adéquate, état parfait) et à en faire un usage approprié selon le mode d’utilisation recommandé.

La santé sexuelle et reproductive n’est pas une question ou « un problème » de femme. Elle est une question de couple. Pour l’homme, comprendre ce que vit sa partenaire autour des cycles menstruels, de sa différence physiologique, le rapprochera d’elle. Bien écouter les besoins ou non d’enfant exprimés par la partenaire autant qu’exprimer soi-même ses besoins ou non d’enfant à certains moments-clefs de la vie de couple est indispensable. Aborder ces thématiques dénote une ouverture qui sera appréciée à sa juste valeur par sa partenaire. Outre l’application du principe d’égalité entre hommes et femmes, pour la femme, c’est une manière concrète d’impliquer son partenaire dans leur vie sexuelle et reproductive, de lui faire comprendre que la responsabilité d’un «accident» n’est pas portée par elle seule car les éventuelles conséquences non désirées toucheront clairement et la femme, et l’homme, voire le couple ou la future famille.

En cela, la gestion par le couple de la contraception est un très bon test sur le niveau de confiance réciproque des partenaires plus particulièrement lorsqu’ils souhaitent construire une relation sur le long terme. Dans ce cas, la transparence sur les désirs de parentalité de chaque partenaire est nécessaire pour donner le maximum de chance à l’éventuelle future famille de partir sur de bonnes bases relationnelles et affectives.

La triade mère-enfant-père : la base de l’équilibre de la famille

La triade, c’est avant tout la formation d’une petite équipe qui va s’engager dans une grande équipée ! La dyade mère-enfant est une réalité physique et physiologique, mais elle ne doit surtout pas empêcher la triade de grandir avec elle. Les familles actuelles ne peuvent plus s’offrir le luxe de ne pas intégrer le père dans l’ensemble du processus de création de la famille.

S’il semble s’établir clairement en ce début de XXIème siècle que l’on ne naît pas parent mais qu’on le devient, la gageure pour ces derniers ne consiste plus à suivre un modèle parental existant, mais à créer un mode de vie parental qui leur soit propre et adapté. Les enjeux sont clairs. Pour la femme, il s’agit de prendre de la distance vis-à-vis des injonctions qui lui dictent que sa féminité dépend de sa maternité, qu’elle seule sait aimer un enfant, que sa responsabilité consiste à fonder et à gérer un foyer. Pour l’homme, il s’agit de prendre conscience qu’il est capable de prendre soin : des autres, de son enfant, mais aussi de lui-même. Le nouveau couple parental doit trouver son équilibre en fonction de ses valeurs propres qu’il devra créer ou harmoniser une fois l’enfant et la famille constituée.

En Suisse, les couples qui trouvent leur équilibre dans une répartition traditionnelle des rôles sont soutenus par le système en place, puisque l’ensemble de la sécurité et des aides sociales répond encore à ce modèle. Pour eux, la question de la répartition des activités et responsabilités domestiques sera peut-être moins aigüe. Pour les couples parentaux qui souhaitent un mode de vie plus inclusif, où chacun des partenaires prend indistinctement en charge les activités rémunérées et non rémunérées, les choses se gâtent. Pour pallier à un système peu conciliant, la création d’une nouvelle organisation familiale en coparentage devient indispensable.

Le coparentage signifie que chaque parent est capable de prendre en charge la responsabilité entière de chaque tâche éducative ou domestique. Dans ce cas, la question du rôle éducatif et soignant de chaque parent se pose rapidement et la confiance réciproque des deux parents est indispensable : aucun des deux ne sait mieux que l’autre comment prendre en charge le bébé ; chacun.e fait à sa manière ; il n’y a pas de méthode unique mais une attention permanente et bienveillante à apporter au bébé ; personne n’est chef.fe de maison mais les deux sont coparents

 

L’haptonomie, une manière d’entrer en paternité avant l’accouchement

Les hommes peuvent être acteurs de la naissance et se sentir appartenir à une équipe bien avant l’accouchement. L’haptonomie est une approche qui permet cela puisqu’elle implique la future mère, l’enfant et le père. En entrant en communication avec son bébé par le toucher, en prenant soin physiquement et moralement de sa compagne, le futur père réalise qu’il est capable d’être lui aussi un « soignant ». Il prend confiance en lui et commence à entraîner sa réalité de futur parent. Il déconstruit certains rôles genrés qu’il a intériorisés : son éducation masculine a généré des lacunes autour de l’identification et  l’expression des émotions, de(s) ressentis. Il n’a souvent que très peu entraîné ses capacités à s’occuper d’autrui. Lui, qui sa vie durant a reçu des soins de la part des femmes, constate qu’il est aussi capable d’en prodiguer : à son enfant ; à sa partenaire ; à lui-même.

Certains hommes qui ont essayé l’haptonomie n’ont pas « pu » continuer. « Cela ne me parle pas » ; « C’est trop bizarre » ; « J’étais mal à l’aise », etc.  Cette pratique est assez révélatrice du chemin que va vivre chaque personne qui s’implique émotionnellement et relationnellement dans sa fonction de père : sortir de sa zone de confort ; apprendre à écouter autre chose que la raison, la logique linéaire ; s’ouvrir à l’expérience de l’autre, aux ressentis subtils et déstabilisants qui accompagnent cette révolution qu’est l’arrivée d’un enfant. Il y a de cela plus de 20 ans, lorsque pour la première fois j’ai posé ma joue contre le ventre bombé de ma compagne, je me suis dit : « mais qu’est-ce que je suis en train de faire ? ». J’ai même ressenti un peu de peur. Quelque chose m’échappait. Beaucoup de choses échappent aux hommes qui deviennent pères… Plus ils apprendront tôt à vivre avec cette incertitude, plus ils pourront accompagner harmonieusement et avec confiance la naissance de l’enfant.

Devenir père et parent… mais pas que

Créer le cocon familial

La fierté de devenir père de famille. La joie de faire connaissance avec le bébé après des mois à attendre. Le soulagement car la maman et le bébé vont bien après l’accouchement. Mais c’est aussi le souci pendant la grossesse quand sa compagne ne va pas bien ; si le bébé ne va pas aussi bien que souhaité ; si c’est différent que prévu. Avec l’arrivée de la paternité beaucoup de choses changent en peu de temps. Les repères qu’on avait ne sont plus aussi utiles. On peut se sentir un peu perdu. C’est normal. C’est ce que tous les pères et les mères vivent ! C’est normal que l’on se sente dépassé parfois. Il n’y a aucune honte à cela ! Soyez compréhensif vis-à-vis de votre partenaire si elle craque. Encouragez-vous ! Allez chercher du soutien autour de vous. Contactez des professionnel.le.s, sans gêne. Ils sont là pour vous !

Tout d’abord, il faut savoir qu’il n’y a pas une manière parfaite pour devenir parent. Cela s’apprend chaque jour, en faisant les choses. Chaque parent, le papa et la maman, est capable de s’occuper de l’enfant. Chacun avec sa manière. Le bébé est bien quand il sent que l’on satisfait ses besoins de base. Pour s’occuper du bébé, il faut être en forme, donc bien dormir. Ce n’est pas facile car au début le bébé ne dort pas toute la nuit. Il doit manger souvent. Il faut donc faire attention que le père qui travaille dorme assez. Il faut aussi que la mère puisse se reposer. C’est la chose la plus importante à organiser au début. Quand on ne dort pas assez, notre humeur change, on peut avoir des peurs, des angoisses, être irritable même violent. Les deux parents doivent aider l’autre à bien récupérer : dormir au salon ; faire des siestes durant les pauses au travail, etc. Le père n’a que quelques jours pour accueillir la famille à la maison. C’est donc un gros stress quand il retourne au travail de laisser sa compagne et son enfant à la maison. Il peut se sentir inutile, impuissant. Il peut parfois avoir le sentiment de manquer quelque chose. Il peut même penser qu’il est mis de côté par la mère et l’enfant. Ces pensées arrivent régulièrement chez les pères. C’est normal.

Une manière efficace pour en avoir moins, c’est de faire des choses concrètes pour la famille. Par exemple, prendre la responsabilité de certaines tâches de la maison. S’occuper tout seul, sans l’aide de la mère, de tout ce qui concerne les achats. Cela permet au père de s’intégrer à la vie de famille car il doit savoir tout ce qui se passe pour acheter ce qu’il faut. Une autre manière c’est d’en parler avec d’autres papas qui vivent ou ont vécu la même chose. Cela permet d’échanger des trucs pour mieux s’en sortir. Et ça fait tellement de bien de voir qu’on n’est vraiment pas le seul avec ces soucis !

Prendre soin du couple amoureux du début

Au retour à la maison, les deux nouveaux parents sont centrés sur le bébé. Pourtant le couple d’avant l’enfant doit continuer à exister. C’est grâce à lui que l’enfant est là ! Mais beaucoup de choses ont changé. Après l’accouchement, le corps de la femme est différent. Il faut apprendre à le redécouvrir, comme une première fois. Simplement avec plus d’attention encore car il a souffert. La femme a besoin de temps pour accepter son nouveau corps. C’est l’occasion d’être attentif à ses besoins. Mais il faut aussi lui dire vos besoins pour trouver une manière de faire qui va pour chacun des deux. Cela ne sera pas parfait dès le début mais beaucoup mieux que si chacun souffre en silence. Il faut garder vivant ce lien physique et sensuel du couple amoureux. Etre patient et confiant en l’autre et aussi reprendre rapidement les activités que le couple faisait avant l’enfant. La relation avec le bébé ne remplace pas la relation entre les deux partenaires du couple.

Prendre soin de soi-même : pas évident pour un homme éduqué comme tel

Dès qu’un nouveau rythme de vie est trouvé, chaque parent peut refaire des choses pour soi. Voir ses amis, faire son sport, sortir. Prendre aussi du temps pour faire le point sur son niveau d’énergie, ce qui va bien, ce qu’il aimerait changer, ce qui lui manque pour se sentir mieux au fond de lui-même. Cette discussion, le père peut la faire avec lui-même. S’il arrive à la faire avec sa compagne, c’est un plus. Lui parler en « Je » sur ce qu’il ressent. Lui dire « Je me sens mal en ce moment » ou « J’ai l’impression que le moral retombe maintenant après le stress de l’accouchement ». Exprimer ses émotions n’est pas un signe de faiblesse. Au contraire, cela montre que vous faites confiance à votre compagne, que vous vous ouvrez à elle. C’est une preuve d’amour. C’est comme cela que vous créez une équipe. Et vous aurez besoin d’être une équipe solide pour vous occuper de votre enfant durant toute une vie !

Choisir son mode de vie familial

Répartition du travail rémunéré et non rémunéré au sein du couple

L’arrivée du premier enfant dans un foyer a également un impact sur la répartition des tâches ménagères au sein d’un foyer, dans le sens défavorable aux femmes. En effet, les évidences montrent, qu’en Suisse, la répartition des tâches ménagères est peu discutée à l’inverse de l’investissement de chacun des deux parents auprès des enfants. A nouveau, les contraintes économiques jouent un rôle prépondérant : la diminution ou l’arrêt total des activités rémunérées d’une jeune mère résulte du fait qu’elles ont souvent un salaire moins important que leur partenaire, ou qu’elles sont jugées, sur la base d’une différence supposée naturelle entre les deux sexes, plus aptes à la réalisation des tâches domestiques. De plus, les deux parents n’ont pas le même type d’activité avec leurs enfants. Alors que le père passe du temps avec son enfant surtout le soir pour différentes activités récréatives, la mère est présente durant toute la journée et prend proportionnellement moins de temps pour les activités récréatives mais plus pour les soins de base (MenCare Suisse – Report Vol. 1, 2016).

L’empreinte MenCare : quelle est ma contribution aux activités domestiques ?

La Constitution suisse garantit l’égalité de fait entre les femmes et les hommes, dans tous les domaines de la vie. Donc aussi pour la répartition entre les activités rémunérées et non rémunérées (travail domestique) ? Cela semble juste. Mais est-ce vraiment le cas ? En fait, dans la réalité, les femmes font environ les 2/3 du travail non rémunéré. Les hommes, 1/3. Pour plus de détails, vous pouvez lire notre rapport : L’empreinte MenCare. Elles font le double de nous. Pour le travail rémunéré, c’est exactement le contraire. Les hommes font le double des femmes. Cela vous semble un peu biaisé ? Ça l’est effectivement. Alors, vérifiez quelle est votre situation à la maison et faites le test en répondant à 10 questions rapides!

La charge mentale domestique

En fonction du mode de vie souhaité ou contraint, le couple va répartir différemment les activités domestiques et éducatives. Dans un couple dit inclusif, le père prendra des responsabilités identiques à celles de la mère, avec la charge mentale qui y est associée. Cette notion de charge mentale n’est pas toujours facile à saisir pour les futurs pères. Ils la comprennent intellectuellement mais ont plus de difficulté à saisir sa signification concrète. La charge mentale ne consiste pas seulement dans la réalisation de tâches mais s’exprime principalement dans le fait de penser à ses tâches et d’avoir le souci de les organiser et de ne pas les oublier.

Sa gestion semble être un facteur prépondérant dans la mise en place d’un bon équilibre à long terme de la vie familiale et de couple. Dans la grande majorité des cas, l’homme et la femme ont tous deux une activité rémunérée, l’homme souvent à plein-temps et la femme à temps partiel. Or, si les soucis domestiques ne sont portés que par la femme, ils deviennent rapidement trop lourds et intenables (burn out maternel, divorces). Dans les faits le père, en tant que coparent, remplit une partie croissante des tâches même s’il a souvent un taux d’occupation supérieur. Mais cela ne suffit pas. Pour partager vraiment cette charge, il doit également prendre la responsabilité de ces activités, comme il le fait à son travail, tout seul, sans solliciter en aucune manière sa partenaire. Par exemple, il évite d’envoyer des SMS à sa compagne pour lui demander quand il fait les courses où est le lait et s’il faut de la farine… Sinon, in fine, c’est elle qui en réalité organise les courses. Or c’est justement cela qui lui pèse. Le partenaire en est tout à fait capable. Ce faisant il allège le fardeau de la mère qui porte la plupart du temps la double responsabilité professionnelle et domestique.

Pour beaucoup de femmes, la charge mentale est une réelle souffrance que leurs partenaires n’évaluent pas à son juste niveau. La responsabilité domestique n’est pas de même nature que les soucis d’ordre professionnels, notamment sur le plan émotionnel. La gestion de la santé des enfants est un exemple parlant. La mère qui doit assurer seule une situation critique autour de la santé de l’enfant durant la journée aura porté seule l’ensemble du stress. Lorsque le père rentre du travail, il trouvera souvent une situation sous-contrôle, s’en félicitera et en félicitera sa partenaire, ceci sans même imaginer la tension émotive portée par celle-ci. Partager la charge mentale ne consiste donc pas seulement à « aider sa partenaire » voire pire « lui rendre service » mais à prendre la responsabilité de parent, indépendamment de l’autre parent. L’enjeu se situe dans la responsabilité globale de penser, organiser et contrôler les activités. Ce qui épuise les parents qui portent seul.e.s l’économie familiale, c’est l’addition toutes ces choses « à ne surtout pas oublier ». Or, l’énergie de la famille est une même entité. Il faut donc que le couple mette en place une réflexion précise et engagée autour de la manière de conserver un niveau d’énergie suffisant pour assurer au mieux les programmes familiaux hebdomadaires souvent très lourds.

Pour ce faire, la répartition claire de la responsabilité des différentes activités dans le couple est incontournable. Il existe différentes stratégies pour gérer au mieux cette répartition des responsabilités familiales mais toutes vont nécessiter dialogue et négociation. Les critères de répartition sont importants : plaisir/déplaisir/ indifférence à faire une activité ; moments de la journée/la semaine ; type d’activité ; répartition dans le temps, etc. Cette répartition de la charge mentale peut être rediscutée régulièrement au fur et à mesure du développement de l’enfant et de la situation familiale. Le partage de la charge mentale domestique et éducative entre les deux partenaires du couple parental signifie concrètement qu’il y a deux coparents et non pas une mère et un parent de « réserve » quand il y a une urgence ou une décision importante à prendre pour l’enfant. Chaque coparent est un parent de l’enfant à prendre en charge. Son rôle ne définit pas en fonction des besoins de l’autre partenaire mais bien des besoins de l’enfant.

Prendre soin de son équilibre de vie : s’écouter au plus profond de soi

Le terrain du care (du soin aux autres et à soi-même) est l’un de ceux que les hommes commencent seulement à défricher. La « répartition » millénaire des activités en deux sphères distinctes (l’intérieur, le care vs l’extérieur, la domination) se traduit encore actuellement dans la reproduction d’une éducation et d’un environnement genrés. Un garçon aura bénéficié tout au long de sa vie de soins majoritairement prodigués par des femmes, au sein de la famille et dans le monde professionnel. Comment avec un tel modèle peut-il intérioriser que les hommes sont eux aussi capables de fournir des prestations de soins, en tant qu’être humain mais aussi en tant que professionnel ?

Les hommes qui réussissent à trouver leur place dans une fonction de care, soit au niveau personnel (père) ou professionnel et social (bénévole ou professionnel des soins) ont su dépasser les injonctions genrées, les freins et les situations discriminantes produites par la société.  Pour y arriver, ils ont probablement dû faire  preuve d’une conviction personnelle importante, d’un haut niveau de résilience et/ou s’appuyer sur un environnement soutenant. En sortant du « mainstream », du courant dominant, de ce qui est attendu d’eux, ces hommes ont initié un processus personnel et intime autour de leur identité masculine. Ils se sont interrogés sur ce qui définit leur masculinité : moi ? mon environnement ? la société ? mes comportements ? mes actes ? Cette démarche soutient leur développement personnel et leur permet de découvrir et visiter leur sphère intérieure, de mieux connaître leurs valeurs personnelles et d’identifier celles dans lesquelles ils se sentent le mieux. Ce dépassement de la définition sociale de la masculinité (restreinte à la virilité) demande d’aller découvrir, souvent seul, un territoire inconnu en réinterrogeant un modèle de masculinité dominant : « les valeurs qui définissent « les hommes » dans ma société sont-elles vraiment les miennes ? », « Qu’est-ce qui m’appartient et ne m’appartient pas ? » De plus en plus d’hommes semblent activer ce processus de manière consciente et lucide. Mais force est de constater que pour le déclencher, il faut encore bien souvent une situation de crise (licenciement, burn out, accident, séparation, maladie, etc.) qui impose un temps de réflexion sur sa vie et les ingrédients qui lui donnent du sens. Un temps qui permet aux hommes de s’arrêter, de respirer et de décider d’apprendre à mieux connaître une autre facette d’eux-mêmes.

Le temps de la paternité est un moment particulier qui favorise l’ouverture du futur père à ses ressentis. La puissance de la vie s’impose à lui. Il apprend le lâcher prise et la perte de contrôle. Il découvre avec délice, crainte ou courage, de nouvelles facettes de son être. Il doit apprendre à se créer une place dans la famille qui se forme et à définir son rôle de père et de parent, en négociation permanente avec sa partenaire. Ce monde de la naissance n’est pas le sien. Il doit le découvrir et l’apprivoiser pour pouvoir s’y mouvoir le plus librement possible en gérant les injonctions reçues selon lesquelles il n’est pas aussi apte que la mère à remplir ses obligations. Le regard de la mère sur la manière dont le père prend soin du bébé sera décisif. Le nouveau couple parental, sera plus fort s’il fait équipe dans une confiance réciproque autour de l’enfant.